C’est quoi le BRF (Bois Raméal Fragmenté) ?

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Le BRF, ou bois raméal fragmenté est le passage obligé pour un jardin sain et naturel, facile à travailler et entretenir, économe en eau et fertilisants, avec un rendement bien supérieur.

Ce mot barbare évoque le bois de branches d’un diamètre assez petit pour que nous puissions le passer au broyeur, en général 30 millimètres pour les broyeurs familiaux. Le principe consiste à imiter en accéléré la formation du sol des forêts par l’apport des déchets végétaux. Aussi ne vous étonnez pas de voir pousser une multitude de champignons dans votre BRF, ils participent à l’élaboration du milieu.

Inventé et pratiqué depuis 1970 au Canada, exporté en Afrique et Madagascar, il est en passe de devenir international. Les études pratiquées montrent des rendements de 200% à 300% dans la culture des fraises au Canada, et des rendements de 500% à 800% sur les cultures de tomates et courgettes en pays tropicaux, notamment grâce à la régulation des nématodes par le BRF.

Quelle est la particularité du BRF ?

Le BRF est un excellent régulateur de température, hiver comme été. Cette gestion de l’écosystème permet de gagner une zone de rusticité. Ces techniques agissent comme régulateur de température et régulateur hydrique, qui favorisent la croissance et la rusticité des végétaux. De plus, des plantes en bonne santé passent mieux l’hiver et les pics climatiques sont moins perceptibles par les sols et les plantes, hiver comme été.

Une formation (pédogenèse) des sols équilibrée permet d’éviter la prolifération des ravageurs et maladies. On obtient également une importante limitation des adventices en raison du rééquilibrage du PH du sol et de l’effet mulching. En terrain pentu on évite l’érosion des sols, en terrain plat on favorise la pénétration de l’eau de pluie, en sol sableux on augmente la capacité de rétention en eau, en sol limoneux on évite la battance qui colmate le substrat. Le bois joue également le rôle de rétenteur d’eau qui permet de réduire considérablement l’arrosage ou de cultiver en régions arides.

Le temps nécessaire à l’humification d’un sol passe de 80 ans avec du fumier à 50 ans avec du compost et moins de dix ans avec du bois fragmenté.

Le type de bois à utiliser pour faire du BRF

Il est indispensable d’utiliser du bois qui n’a pas séché car la sève participe à la formation biologique du substrat. Pour éviter d’acidifier le sol, on évite d’utiliser des branches de conifères, mais une proportion jusqu’à 20% est toutefois acceptable. La période la plus favorable est celle du repos hivernal car c’est celle qui fournit le plus de matière première, et que l’absence de feuillage facilite le travail de broyage. De plus la lignine contenue dans les branches à cette époque est plus facilement dégradable.

Le seul problème rencontré est le volume de branches à trouver. Si votre jardin n’en produit pas assez, il faut le collecter chez les voisins, les paysagistes, les collecteurs de déchets ou le service espaces verts de votre commune. Trois mètres cube de branches permettent de préparer 10 m² de BRF avec une couche de broyat de 3 à 6 cm. Cela représente également 120 kg de broyat pour une surface de dix m².

Comment faire du BRF ?

Matériel nécessaire pour la fabrication de BRF: Sécateurs, scie égoïne, broyeur de végétaux.

Pour une utilisation domestique, on optera pour un broyeur électrique léger et peu encombrant, suffisant pour traiter un bon volume de bois. Il existe deux technologies différentes, dont une présente à mon avis une grande supériorité pour un rendement équivalent voire supérieur.

1) Broyeur à plateau tournant (190€ à 850€ et+): un disque rotatif horizontal portant 2 à 4 couteaux déchiquette le bois qu’on introduit dans l’appareil.

Nombreux inconvénients : Niveau sonore élevé nécessitant le port de protections auditives renforcées. Bourrage de l’appareil fréquent avec le feuillage. Débourrage délicat sur de nombreux appareils. Affûtage et remplacement régulier des couteaux indispensable. Prix d’achat plus élevé que la deuxième technologie.

2) Broyeur à turbine (120€ à 500€): un moyeu cranté entraîne, broie et coupe les branches sur une contre-lame réglable en écartement.

Niveau sonore très faible car la turbine est en rotation lente (40 tours/min.). Les végétaux passent facilement car ils sont entraînés vers le bas par la turbine. Débourrage très facile car on peut écarter la contre-lame avec une molette et débourrer par le haut en inversant le sens de rotation de la turbine.

Il est préférable de choisir un appareil équipé de roues de transport et d’un bac de récupération rigide pour faciliter la récupération et la manipulation. Même les modèles d’entrée de gamme sont excellents.

Si vous voulez adopter le BRF pour vos plantes d’appartement et balconnières, un sécateur suffira pour débiter les petites branches que vous pourrez récolter dans la nature. Comme au jardin, commencez par apporter le matériau en surface sur une épaisseur de 3 à 5 cm, puis après 3 à 6 mois incorporez le au substrat de culture, si nécessaire en effectuant un rempotage. Pour les plantes annuelles, ajoutez au terreau habituel jusqu’à 50% de BRF préalablement composté; le mélange pourra être réutilisé plusieurs années de suite.

Comment utiliser le BRF ?

Le BRF en 4 étapes:

  1. Récolte du bois raméal.
  2. Broyage des branches assez rapidement après récolte pour éviter la fermentation et le dessèchement, surtout en période chaude.
  3. Épandage au jardin en couche de 3 à 10 cm, immédiatement après broyage. Dans les semaines qui suivent, on peut constater l’évolution du bois à l’apparition de filaments blancs (mycélium de champignons) et divers champignons non comestibles pour la plupart, mais vous pouvez avoir la surprise de quelques morilles.
  4. Enfouissement superficiel à la griffe après trois à six mois de maturation. Sur les massifs de vivaces, le BRF peut être conservé en paillage, il s’intégrera seul, évitera le tassement du sol, la croissance des adventices et l’évaporation. Il mettra toutefois plus de temps à évoluer en éléments nutritifs assimilables par les plantes.

Rien n’empêche de cultiver le sol pendant l’élaboration du BRF, il suffit de l’écarter à l’emplacement de la culture. Pendant cette transformation du bois, il est nécessaire de cultiver des plantes fourragères apportant de l’Azote (pois, haricots, fèves,…), ou de compenser par des apports en corne torréfiée, fientes de volaille ou sang desséché pour éviter la « faim d’Azote ». En savoir plus sur l’utilisation du BRF.

Quand faut-il renouveler le BRF ?

Vous pourrez renouveler votre apport de BRF après 3 ou 4 ans pour reconstituer les réserves du sol, mais si vous disposez de grandes quantités de bois, vous pouvez l’apporter en continu ou le composter.

Jacques Hébert, l’un des pionniers du BRF, pépiniériste à Québec, utilise cette pratique depuis 1979. Après un pré-compostage en tas ensemencé de mycorhizes pendant un mois, il incorpore le BRF au sol par griffage, et termine par un mulching de bois frais de deux centimètres qu’il renouvelle chaque année pour entretenir l’activité du sol.

Le Bois raméal fragmenté n’est pas un paillage ordinaire d’écorces. Même s’il en est visuellement très proche, sa constitution est radicalement différente et les effets sur la végétation le montrent bien.

L’effet du BRF sur le sol

Les BRF favorise la formation de mycorhize, champignons microscopiques facilitant l’assimilation des éléments nutritifs par le système racinaire. Le champignon dépend des végétaux pour se procurer son énergie, en retour il aide le végétal à tirer ses aliments (sels minéraux) du sol et protège ses radicelles contre certaines maladies. Les hyphes sont des filaments plus ou moins ramifiés qui constituent l’appareil végétatif des champignons, tandis que la partie visible, celle que l’on appelle improprement champignon est en fait son appareil reproducteur. Mycéliennes s’enroulent étroitement autour des extrémités des racines (ectomycorhize) ou même pénètrent dans la racine (endomycorhize), vivant ainsi en symbiose avec la plante.

Les mycorhizes ont une grande capacité à extraire l’eau et les minéraux du sol. Ils les apportent en grande quantité aux plantes qui, en échange, leurs fournissent des composés carbonés tirés de l’air (CO2). On le remarque particulièrement dans les prés, les « ronds de sorcière » à l’herbe drue et haute sont l’expression des mycorhizes sur lesquels nous récoltons les mousserons. Cela met en évidence entre autres le fer, élément essentiel dans la respiration et la photosynthèse, qui est sous des formes insolubles dans le sol. Certains champignons associés à des bactéries spécialisées de la rhizosphère solubilisent le fer et le rendent disponible pour les hyphes et les racines.

Ces transferts sont si efficaces, qu’ils remettent en cause le concept de compétition pour les nutriments entre les plantes d’un écosystème, en particulier pour la capture des phosphates par les racines (ils permettent de se passer des fertilisants phosphates).

Les hyphes possèdent des caractéristiques physico-chimiques particulières qui leur permettent mieux qu’aux racines seules, d’absorber de l’eau fortement retenue par les colloïdes du sol (argile), ou très concentrée en solution (éléments nutritifs dissous qu’elle contient :azote, phosphore, potassium, magnésium…). Tout ceci est ensuite partagé avec le végétal.

Donc le mycorhize est une association mutualiste, spécifique, intime, durable et à bénéfice réciproque entre le champignon et la plante. En effet, les mycorhizes, tout comme la plupart des parasites végétaux et plus particulièrement les agents pathogènes fongiques (mildiou, oïdium, …), obtiennent leurs ressources nutritives carbonées directement de l’hôte végétal. Leur cohabitation avec la plante entraîne une compétition directe entre symbiote (mycorhize) et parasite (maladie fongique) pour ces ressources énergétiques, et donc un amoindrissement de la sensibilité de la plante; le mycorhize fournissant d’autant plus de réserve à la plante hôte pour obtenir suffisamment d’énergie.

Après un an de formation, on constate un rééquilibrage du PH du sol (acidité), une amélioration de la structure (sol léger et aéré), un accroissement de la capacité de rétention en eau permettant de réduire les arrosages de 50% à 80%, un déblocage d’éléments nutritifs permettant une réduction conséquente des apports d’engrais et une diminution des plantes adventices (« mauvaises herbes »). Les végétaux cultivés sur BRF sont plus résistants aux maladies et parasites, à la sécheresse et au gel. Le lessivage des éléments fertilisants du sol est fortement réduit, et la formation d’humus accélérée. Une fois rétabli, le potentiel mycorhizien d’un sol peut perdurer de nombreuses années.

L’activité agricole peut perturber ou modifier la microflore fongique et sa capacité à mycorhizer. Certaines pratiques culturales comme le labour ou le bêchage, le tassement par des engins lourds détruisent ce fragile équilibre. La fertilisation azotée (N) et la fertilisation phosphatée (P), nuisent à la prolifération mycorhizienne. Il faut donc limiter ces apports au stricte minimum pour laisser faire la nature.

Aurélien Leclair
Aurélien Leclair
Passionné de permaculture et jardinage depuis mon enfance, je partage mes conseils pratiques, des tutoriels étape par étape, et des astuces pour vous aider à faire prospérer vos plantes. Que vous ayez un grand jardin, un petit balcon ou juste quelques pots sur le rebord de la fenêtre, il y a toujours quelque chose à apprendre et à découvrir. Je publie des articles sur la culture des légumes, des fleurs, des arbres fruitiers, ainsi que sur les techniques de jardinage biologique et durable. Mon objectif est de rendre le jardinage accessible à tous, en simplifiant les concepts et en partageant mes expériences personnelles.

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